Extrême-droite
La tuerie de l’île d’Utoya (Norvège), perpétrée par un « fondamentaliste chrétien », interroge le discours de haine des extrêmes droites européennes, dont le Front national.
« Le FN a un rôle pacificateur. » À se tordre de rire (jaune), n’était l’auteur de la phrase, Bruno Gollnisch, cadre déchu du Front national. Une fois n’est pas coutume, il volait dimanche au secours de sa rivale, la présidente du mouvement d’extrême droite français Marine Le Pen. C’est qu’une des conclusions politiques tirées de la tuerie d’Utoya (lire en page 13) ne leur plaît évidemment pas : les partis populistes et d’extrême droite européenne, dont le FN fait partie, sont accusés, par le Mrap notamment, de porter une « lourde responsabilité dans le climat délétère qui pèse sur le continent tout entier ».
L’association, qui met également en cause, « en France, la droite extrême qu’est la Droite populaire », en appelle à « plus de vigueur dans la lutte contre les groupuscules d’extrême droite racistes, ainsi qu’à plus de responsabilité pour combattre des politiques dont on sait qu’elles entretiennent la xénophobie et le rejet de l’autre ».
« Le Front national est évidemment parfaitement étranger à la tuerie norvégienne », a cru bon de préciser Marine Le Pen. « Les Français savent très bien qu’on n’incite pas à ce genre d’action violente », plaide Steeve Briois, son bras droit. Eux ne font pas le lien entre les discours haineux et le passage à l’acte. Et s’ils se disent prêts à déposer plainte pour diffamation contre « quiconque » se prêterait à l’exercice, c’est sans doute qu’il y a matière à creuser.
Certaines réactions sont en effet pour le moins ambiguës. La Droite populaire, partie intégrante de l’UMP, n’est intervenue que pour... demander l’arrêt des subventions au Mrap, « issu historiquement » du Parti communiste. Jean-Marie Le Pen l’a fait en son temps. Une « surenchère avec le Front national » dénoncée par le PCF. Au FN, Bruno Gollnisch souligne « l’interprétation littérale du Coran qui permet à certains de partir en guerre contre les chrétiens », alors que « la Bible ne permet pas l’inverse ». Laurent Ozon, membre du bureau politique du parti, écrit sur Twitter : « Expliquer le drame d’Oslo : explosion de l’immigration x 6 (multipliée par 6) entre 1970 et 2009. » Pacificateurs, vraiment ?
Le poison de la musulmanophobie
Les idées véhiculées par les partis populistes et nationalistes européens nourrissent bien la violence. Pour le chercheur spécialiste de l’extrême droite Jean-Yves Camus, « depuis dix ans (elles) présentent l’Europe comme un continent en voie d’islamisation et tous les musulmans comme des ennemis de l’Occident ». Mathieu Guidère travaille sur la radicalisation dans le monde. Il estime logique qu’Anders Breivik ait pris pour cibles les jeunes travaillistes norvégiens « qui diffusent cette idéologie de l’ouverture multiculturelle ». Car « côté chrétien on estime que la culture chrétienne a été corrompue par le multiculturalisme ».