Déclaration de Leila Shahid
L’Europe est elle assiégée comme la Palestine
10 juillet 2011 par Reprise
d’article.
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Leila Shahid, Déléguée générale de la Palestine auprès de l’’UE
Des citoyennes et des citoyens européens ont répondu à l’appel de la société civile palestinienne, représentées par ses ONG, syndicats et
associations, qui les ont invités, aujourd’hui 8 juillet, à se rendre en Palestine pour commémorer l’avis historique de la Cour Internationale de Justice de La Haye du 9 juillet 2004 condamnant
le mur.
Cet avis, de la plus haute instance onusienne, n’a pas empêché, depuis 7 ans, les autorités israéliennes de poursuivre la construction de ce mur
en territoire occupé, violant ainsi le droit international.
Ces citoyennes et citoyens venaient manifester leur solidarité avec les victimes d’une des occupations militaires les plus longues de l’histoire
contemporaine. Cette action, solidaire, pacifique et non violente, devait leur permettre de rejoindre les citoyennes et les citoyens palestiniens dans le territoire occupé, comme d’autres
européens ont tenté de le faire avec la flottille à destination de Gaza.
Les autorités officielles de différents États membres de l’UE, ainsi que des compagnies aériennes européennes, ont répondu aux injonctions du
gouvernement israélien en acceptant d’interdire aux passagers européens, inscrits sur des listes de persona non grata établis par Israël, d’embarquer à bord des vols à destination de
Tel-Aviv à partir de différentes villes européennes.
D’autres, qui ont réussi à arriver à Tel-Aviv, ont été refoulés à l’aéroport Ben Gourion. Nul ne connait sur quelles bases de telles listes ont
été dressées et de quel crime on accuse ces citoyens, ne serait-ce le crime de solidarité internationale.
Il est évident que ces citoyens européens auraient préféré se rendre à l’aéroport de Gaza directement, sans passer par Tel-Aviv, si l’armée
israélienne n’avait pas complètement détruit le terminal et les pistes de l’aéroport il y a dix ans, forçant ainsi toute personne souhaitant se rendre en Palestine à passer par l’aéroport de
Tel-Aviv.
Il est scandaleux qu’un État du Sud de la Méditerranée, qui se prétend un partenaire privilégié de l’UE, se permette de violer ainsi les droits
des citoyens européens de plusieurs États membres : droit à la circulation, droit à l’expression politique pacifique de leurs opinions, droit à la solidarité et la défense du droit
international. Et ceci avec la complicité de certains Etats membres de l’UE !
Le 10 juillet 2011
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Nous naviguerons vers Gaza
Les conclusions du dernier rapport des Nations unies concernant la situation économique
à Gaza sont, malheureusement, limpides : le blocus imposé à la petite bande côtière a des conséquences catastrophiques pour le million et demi de Palestiniens qui y résident. Lors du
deuxième semestre de l’année 2010, le chômage a augmenté pour atteindre 45,2%, tandis que les salaires réels poursuivaient leur baisse : au cours des cinq dernières années, ils ont
chuté de 34,5%. Près de 70% des Gazaouis dépendent aujourd’hui des aides alimentaires internationales.
Même si les communicants d’Israël tentent de nous expliquer que «tout va bien à Gaza»,
chacun doit se rendre à l’évidence : le blocus, malgré les promesses d’«assouplissement», est toujours en place, et la population gazaouie continue d’être victime d’une punition collective,
illégale au regard des conventions de Genève. Chris Gunness, porte-parole de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), déclarait la semaine dernière, avec une amère
ironie, que le blocus «a sans aucun doute été un grand succès pour punir certains des plus pauvres d’entre les plus pauvres du
Moyen-Orient». Il ajoutait qu’«il est difficile de comprendre la logique d’une politique pensée par l’homme qui appauvrit de
façon délibérée tant de gens et qui condamne des centaines de milliers de personnes potentiellement actives à une vie de misère».
Depuis que le siège a été imposé, nombre de voix se sont élevées pour le
condamner : ONG, agences de l’ONU, personnalités de la société civile… Rien ne peut justifier le châtiment imposé aux Gazaouis par Israël, et surtout pas les résultats d’élections
démocratiques. Certains dirigeants occidentaux ont émis des réserves quant au blocus, mais aucune mesure concrète n’a été prise pour contraindre Israël à cesser d’asphyxier les Gazaouis. C’est
pour ces raisons qu’il y a un an, une première flottille faisait route vers Gaza, pour tenter de briser le siège et dénoncer la passivité complice des gouvernements. Elle a été interceptée dans
la violence : neuf morts et vingt huit blessés parmi les passagers. Une brutalité à l’image de la brutalité du blocus.
Un an plus tard, au terme d’une campagne internationale de longue haleine, plus d’une
dizaine de bateaux s’apprêtent à partir vers Gaza. Un bateau français sera parmi eux. Durant plusieurs mois, des centaines d’initiatives ont été organisées aux quatre coins du pays, réunissant
des milliers de participants, dont la détermination, l’enthousiasme et la générosité ont permis de réunir les fonds nécessaires pour permettre à un navire français de se joindre à la deuxième
flottille de la liberté. Le formidable écho recueilli par la campagne «Un bateau français pour Gaza» est à l’image du large sentiment d’exaspération suscité par les agissements d’Israël et révèle
le décalage entre la politique du gouvernement français et l’indignation de nos concitoyens.
Nous naviguerons vers Gaza. Parce que nous ne pouvons nous résoudre au silence. Parce
que nous n’acceptons pas d’être complices des autorités françaises qui se refusent à sanctionner Israël. Parce que nous n’acceptons pas qu’un Etat puisse bafouer les règles élémentaires du droit
international et fouler aux pieds les droits humains. Parce que nous considérons que la position exprimée par le Comité international de la Croix-Rouge en 2010 est plus que jamais
d’actualité : «Pour sortir le million et demi de Gazaouis de la situation précaire dans laquelle ils se trouvent, l’assistance
humanitaire à elle seule ne suffit pas. La seule solution durable consiste à lever le blocus.»
Nous n’agissons pas par charité : nous prenons nos
responsabilités.
Aucun Etat ne devrait être au-dessus des lois, aucun Etat ne devrait pouvoir
impunément violer les résolutions de l’ONU et les conventions de Genève tout en prétendant hypocritement être dans son bon droit.
Aujourd’hui, le gouvernement israélien promet le pire à tous ceux qui
s’approcheront de Gaza. Même si nous prenons au sérieux ces menaces, nous ne renoncerons pas. Les intimidations et la désinformation israéliennes n’auront pas raison de notre révolte face à la
tragédie palestinienne.
Signataires :
Julien Bayou (Collectif Jeudi noir), Olivier Besancenot (Nouveau Parti
anticapitaliste NPA), Ismahane Chouder (Participation et Spiritualité musulmanes PSM), Jean-François Courbe (Confédération générale du travail CGT), Raymond
Fabrègues (Confédération paysanne), Patrick Finel (Parti de gauche PG), Georges Gumpel (Union juive française pour la paix UJFP), Nicole
Kiil-Nielsen (Europe Ecologie-les Verts EE-LV), Jean-Paul Lecoq (Parti communiste français
PCF)
Le 25 juin 2011
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L'ONU saisie par la Palestine
au sujet des colonies
La Ligue arabe veulent s’adresser au Conseil de sécurité pour tenter d’obtenir une résolution contre la colonisation israélienne, selon le
communiqué final d’une réunion de l’organisation mercredi à laquelle a participé le président palestinien Mahmoud Abbas.
AFP
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10 000 manifestants à TEL
AVIV
pour la démocratie
Source AFP
Des milliers d’Israéliens juifs et arabes, auxquels se sont joints des demandeurs d’asile étrangers, ont manifesté vendredi à Tel Aviv pour une vie
dans « la dignité et la liberté » et contre la montée de l’extrémisme, rapporte l’AFP
« Les manifestants — 10.000 selon les organisateurs — ont défilé dans le centre de la métropole en brandissant des banderoles proclamant
« Les droits de l’Homme s’appliquent pour tous les hommes », ou fustigeant la poursuite de l’occupation israélienne des Territoires palestiniens.
Plusieurs centaines de demandeurs d’asile et travailleurs immigrés originaires d’Afrique ont participé à la manifestation derrière le slogan :
« Les demandeurs d’asile ne sont pas des criminels », selon un photographe de l’AFP.
« C’est une expression de protestation contre la vague grandissante de racisme », a expliqué à l’AFP Hagaï Elad, directeur de Association
pour les droits civiques en Israël (ACRI), organisatrice de la marche à laquelle des dizaines d’ONG avaient appelé.
« Ce qu’il se passe en Israël depuis 18 mois est très grave. La discrimination est partout (…). La démocratie subit des attaques sur tous les
fronts, et ces attaques proviennent du gouvernement lui-même », a-t-il déploré.
Les organisations israéliennes de défense de droits de l’Homme sont régulièrement accusées par le gouvernement de droite de Benjamin Netanyahu de
« faire le jeu du terrorisme », comme l’a encore affirmé vendredi le vice-ministre des Affaires étrangères, Danny Ayalon.
En Israël, les autorités redoublent d’efforts pour endiguer l’afflux de migrants africains, en majorité Soudanais et Erythréens. Et
l’extrême-droite, représentée au gouvernement, poursuit sa campagne contre la minorité arabe accusée de déloyauté envers l’Etat juif.
Une vive polémique a éclaté cette semaine après que 300 rabbins ont signé un appel contre la location et la vente de maisons à des non-juifs, une
mesure qui vise d’abord les Arabes israéliens.
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Un bateau français pour
Gaza!
le 21 février
2011
Au printemps 2011, une seconde flottille de la liberté s’élancera en direction de Gaza pour tenter une nouvelle fois de briser le blocus que
ce territoire subit depuis plus de trois ans. Un bateau français se joindra à cette flottille, à l’initiative de deux réseaux: la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, dont la Cimade
est membre fondateur depuis 1995, et le Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens.
Au total, ce sont plus de 60 organisations, associations, syndicats et partis politiques qui soutiennent cette initiative, afin de
:
- Dénoncer et briser le siège israélien de Gaza,
- Promouvoir et faire respecter le droit international,
- Répondre à la crise humanitaire que subissent un million et demi de Palestiniens de Gaza.
Des membres de la Cimade sont fortement impliqués dans l’organisation de la campagne « Un bateau français pour Gaza », qui vise, en se
joignant à une mobilisation des sociétés civiles du monde entier et par des moyens pacifiques, à obtenir ce que les Etats ne parviennent pas à imposer : la levée du siège de Gaza et le respect
par Israël du droit international.
Pour tous renseignement, pour soutenir la campagne : www.unbateaupourgaza.fr
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Michel Collon donne son point de vue
sur la situation en Palestine et sur
Israel
Sommes-nous bien informés sur Gaza, le Hamas, l’Histoire ? Pourquoi ce divorce entre l’opinion des « Vieux Européens » et les
citoyens d’origine immigrée ? Que peut-on faire pour surmonter ce fossé? Michel Collon, spécialiste des conflits, répond aux questions « provocantes » de l’hebdomadaire belge
Solidaire.
Interview : Julien Versteegh
La crise économique et les soucis quotidiens occupent les esprits et Gaza passe peut-être en second plan dans le quotidien
des travailleurs. Pourquoi ?
Michel Collon. Coluche disait « On ne peut pas dire la vérité à la télé, il y a trop de gens qui regardent ». La question à poser à
la population belge est : pensez-vous être bien informés ? Croyez-vous que dans une région comme le Moyen-Orient avec toute la richesse du pétrole, on va vous dire la vérité ?
Les médias et l’école cachent soigneusement comment Israël s’est imposé. Imaginez ceci… Vous Belges, vivant et travaillant ici depuis des
générations, tout d’un coup, des gens débarquent : « Nos ancêtres vivaient ici il y a deux mille ans, notre Dieu a dit que cette Terre nous appartient, allez ouste, dehors ! » Vous devez quitter
votre maison, vos champs, vos richesses et aller vivre dans des tentes. D’abord, les envahisseurs prennent Bruxelles, Anvers, le Hainaut. Un peu plus tard, Liège et la Flandre occidentale. Ils
bloquent toutes les routes avec un grand mur. Et finalement, vous vous retrouvez tous parqués autour d’Ostende et au fond des Ardennes. Dans des conditions de vie misérables. En plus, on vous
traite de menteurs, de violents, de terroristes. Eh bien, remplacez Ostende par Gaza, et les Ardennes, par la Cisjordanie, vous avez exactement ce qu’a fait Israël !
A propos de désinformation, les Belges ont quand même eu un fameux avertissement, non ? La RTBF a réussi à leur faire croire que la Belgique avait
disparu en une soirée. Alors, prudence ! Dans les années 80, au Nicaragua, un gouvernement de gauche voulait éliminer la pauvreté et résister aux États-Unis. Le Nicaragua a été attaqué par des
terroristes financés par la CIA, et diabolisé par les médias. Les sandinistes ont été chassés et le pays est retourné à la misère. Un prêtre nicaraguayen, alors ministre de la culture, disait : «
Quand je vois ce que les médias racontent sur mon pays que je connais bien, je me dis que je ne dois rien croire de ce qu’ils racontent sur les pays que je ne connais pas ».
Le grand problème, des Belges, des Français, des Européens sur le conflit israélo-palestinien c’est qu’ils sont désinformés. Avec quelques rares
exceptions, la télé se met du côté d’Israël. Ces derniers jours, elle a fini par montrer les crimes d’Israël. Mais tant qu’on le présente comme “ripostant à des roquettes”, on justifie le
colonialisme.
Quand même le Hamas a commencé et il prend la population palestinienne en otage, non ?
Michel Collon. Non. A propos des roquettes tirées sur des villes israéliennes, on ne nous dit pas que des Palestiniens (Hamas,
Fatah et individus) les tirent sur des villes dont on a chassé leurs parents. Ils y habitaient avant ! Pourquoi le cache-t-on ? Mais surtout : le Hamas a respecté la trêve pendant des mois. Or,
cette trêve avait plusieurs conditions. Israël devait lever le blocus qui étranglait Gaza, il ne l’a pas fait. Il ne devait plus commettre d’agressions militaires, il en a commis. L’Égypte devait
ouvrir ses frontières, cela n’a pas été fait. En réalité, c’est Israël qui n’a pas respecté la trêve.
Le Hamas, c’est quand même des fondamentalistes. Des progressistes peuvent-ils les soutenir ?
Michel Collon. D’abord, pendant des décennies, quand le Hamas n’existait pas encore, Israël a tout fait pour détruire le Fatah
d’Arafat et les mouvements palestiniens de gauche. Ensuite, comme le Hebzollah au Liban, le Hamas semble d’accord de respecter le mode de vie de l’ensemble des populations à Gaza.
Les gens ont voté Hamas, s’estimant trahis par les précédents dirigeants palestiniens. Si vous interrogez des Palestiniens de gauche et laïcs, ils
ont voté pour le Hamas parce c’est le parti qui résiste. Il est faux de dire que le Hamas prend les Palestiniens en otage, ce sont tous les Palestiniens refusent et refuseront toujours la
colonisation, même si demain le Hamas était totalement détruit.
Enfin, on nous dit ensuite de façon un peu raciste que ces gens sont des musulmans et qu’ils sont des fanatiques… Qu’on m’explique alors pourquoi
les USA organisent des coups d’Etat pour renverser Chavez, un fervent chrétien ! Ou Evo Morales, un Indien. Au Venezuela, avant Chavez, 80 années de richesse pétrolière ont produit 80 % de
pauvres. L’argent partait dans les poches d’Exxon. Chavez, Evo, les Irakiens ou les Palestiniens : rien à voir avec la religion, tout à voir avec le pillage des ressources de ces pays.
Mais en Palestine, il y a peu de ressources naturelles…
Michel Collon. Le Moyen-Orient forme un ensemble. Les Arabes se voient comme une seule nation. Ce sont les colonisateurs qui ont
divisé la région pour mieux la contrôler. Les Britanniques, puis les États-Unis ont veillé à mettre le pétrole aux mains des rois, des riches saoudiens et autres marionnettes pendant que le reste
du monde arabe se débat dans la pauvreté et le sous-développement. Israël est surarmé par Washington pour être le gendarme du Moyen-Orient. De plus, il veut construire un pipe-line qui en fera le
distributeur du pétrole irakien sur la Méditerranée.
Israël prétend qu’il n’y a personne en face pour négocier et que la paix est impossible.
Michel Collon. La paix est possible au Moyen-Orient. Il faut créer un seul État garantissant tous les droits à tous : juifs,
musulmans, chrétiens ou athées. Un État ne peut pas être fondé sur une religion privilégiée, excluant ou rabaissant les autres. Un seul État, un homme une voix, et le droit au retour pour ceux
qui ont été chassés.
Beaucoup de Palestiniens et d’Israéliens pensent qu’il faudra une solution transitoire avec deux États. A eux de trancher. Sans doute qu’avec toute
la haine qui a été semée, il faudra une ou deux générations pour arriver à une coexistence harmonieuse. En tout cas, je maintiens qu’Israël est l’État le plus raciste au monde, pratiquant le
nettoyage ethnique contre les Arabes. Pour arriver à une solution il faut mettre fin à ce racisme. Un État comportant plusieurs cultures n’est pas un appauvrissement, mais un
enrichissement.
Je pense qu’avec ces provocations et ces destructions terribles, Israël ne veut pas la paix. Il refuse de négocier en sachant que cela risque de
provoquer des attentats. Il aura ainsi un prétexte pour justifier ses nouvelles déportations et annexions.
Le ministre belge des affaires étrangères Karel De Gucht et ses collègues européens semblent prendre une position neutre
dans l’histoire…
Michel Collon. De Gucht n’est absolument pas neutre, et l’U.E. non plus. Elle vient de voter pour Israël un statut de quasi-membre
de l’Union européenne alors qu’Israël viole toutes les résolutions de l’ONU et le droit international depuis des dizaines d’années ! Elle a qualifié de ‘terroriste’ le gouvernement Hamas élu
démocratiquement, ce qui a donné le feu vert à l’agression. Quand la ministre des affaires étrangères israélienne dit qu’Israël défend les valeurs de la communauté internationale devant Sarkozy,
celui-ci applaudit. Quand on voit comment Sarkozy, Merkel, De Gucht et compagnie ont soutenu Israël tout le temps, je dis que ce sont eux qui bombardent en notre nom. Va-t-on continuer à le
tolérer ?
C’est surtout la population belge d’origine immigrée qui se mobilise actuellement. Pourquoi y a-t-il encore tellement d’indifférence et
de passivité des travailleurs « belgo-belges » ?
Michel Collon. Ils sont maintenus dans l’ignorance. Mais la guerre en Palestine fait partie d’une guerre globale Nord – Sud qu’on
mène en notre nom. On ne peut comprendre le monde d’aujourd’hui si on ne comprend pas pourquoi la richesse est au Nord et la pauvreté au Sud.
Les grosses sociétés européennes ont volé l’or et l’argent de l’Amérique latine, les minerais, le caoutchouc et les esclaves de l’Afrique (avec
notre Léopold II coupant les mains quand on refusait de travailler pour lui), et le pétrole du Moyen-Orient. Aujourd’hui, le tiers monde reste pauvre car les multinationales s’y installent en
payant les travailleurs une misère, en interdisant les syndicats, en corrompant les dirigeants politiques et la police. Donc, toute la richesse du Sud continue de partir vers le Nord. Ceci place
les travailleurs belges devant un choix moral : se ranger du côté des volés ou des voleurs ? Réclamer justice ou faire l’autruche en espérant profiter un peu du vol ?
Nous devrions témoigner de plus de curiosité et d’ouverture. En Belgique, nous avons la chance d’avoir des immigrés, y compris des travailleurs
sans-papiers. Il faut parler avec eux, les écouter. On peut en apprendre beaucoup ! Les Arabes vous expliqueront ce qu’a fait l’Europe au Moyen-Orient depuis des siècles. Les Noirs vous
expliqueront ce qu’elle a fait au Congo. Les Latinos pourquoi il y a encore 44 % de pauvres alors que l’Amérique latine est très riche.
Je compare la situation actuelle au Titanic. Avec les très riches en première classe, les classes moyennes et les travailleurs qui sont dans la
troisième classe sans beaucoup de confort mais ils sont dans le bateau.
Seulement le Titanic fonce vers le désastre car le capitaine et surtout les armateurs gagnent gros. Sur le dos de ceux qui rament, les esclaves du
Sud, et sur le dos des travailleurs du Nord. En les appauvrissant et en nous appauvrissant continuellement, ils provoquent la crise, car ils n’ont plus personne à qui vendre.
Les travailleurs belges veulent-ils rester dans le Titanic, fondé sur l’appauvrissement du tiers-monde, un système qui, après la crise financière,
s’en prépare d’autres, peut-être plus graves encore ? Le nombre de pauvres n’a cessé d’augmenter dans le monde depuis 20 ans. Veut-on couler avec le Titanic ou choisir une autre façon de naviguer
basée sur des rapports Nord-Sud justes ?
Que faire alors ?
Michel Collon. Depuis quelques années, je travaille avec l’équipe Investig’Action, et mon site www.michelcollon.info pour décoder
l’info, donner la parole aux exclus de l’info officielle, montrer les images cachées, apprendre à repérer les médiamensonges. Beaucoup de gens m’écrivent, dégoûtés par la presse et découragés,
car on ne les écoute pas.
Il faut une stratégie collective pour que les gens puissent tester l’info et devenir actifs. L’info est un droit qui se conquiert et ne tombe pas du
ciel. Comme tous les autres droits. Ca nécessite une démarche active. Par exemple, si un responsable syndical a encore un doute sur qui est l’agresseur et le colonisateur entre Israël et les
Palestiniens, qu’il organise donc pour tous ses affiliés un débat avec les deux parties, qu’il s’informe sur Internet, auprès des syndicalistes palestiniens et auprès de ceux que la télé exclut
de ses débats !
Pour conquérir le droit à une information de qualité, complète et non manipulée par des intérêts, nous avons besoin d’un mouvement citoyen pour
l’information, à la base. « Nous sommes tous des journalistes ! »
Le 8 mai 2011
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Les défis du gouvernement
d'union nationale palestininen
Quels que soient les membres de ce gouvernement de transition, et quel que soit le nom de son chef, je pense qu’ils vont devoir affronter trois
principaux défis : un défi intérieur, un défi israélien et un défi international.
L’accord de réconciliation entre les différents mouvements palestiniens a été signé cette semaine au Caire, grâce à la médiation égyptienne, mais
surtout grâce aux manifestations populaires des Palestiniens qui se sont rassemblés en masse pour le revendiquer. D’autres manifestations de joie et de soutien regroupant toute la population
civile de la bande de Gaza qui a beaucoup souffert de cette division, ont suivi cette signature historique et depuis, ici, tout le monde attend avec impatience son application sur le
terrain.
Dans cet accord, le premier point porte sur la formation d’un gouvernement d’union nationale, un gouvernement intérimaire qui se composerait de
personnalités indépendantes, agréées par le Fatah et le Hamas.
D’ici deux semaines, un nouveau gouvernement va donc voir le jour dans les territoires palestiniens, un gouvernement qui sera chargé de régler les
questions liées à la division, et d’unifier les institutions palestiniennes de Gaza, de Cisjordanie et de Jérusalem-Est, sans oublier la reconstruction de Gaza et l’obtention de la fin du blocus
qui dure depuis plus de 4 ans.
Quels que soient les membres de ce gouvernement de transition, et quel que soit le nom de son chef, je pense qu’ils vont devoir affronter trois
principaux défis : un défi intérieur, un défi israélien et un défi international.
Le défi intérieur : la situation inter-palestinienne est très compliquée. Nous sommes face à deux projets différents, avec des stratégies
différentes : un projet de négociation de paix avec les Israéliens, projet très impliqué dans un processus de paix qui n’a pas abouti à des résultats concrets, projet qui préfère la
résistance populaire et non-violente contre l’occupation, et un autre projet qui s’oppose au premier et qui préfère la résistance militaire comme forme de résistance à l’occupation, même si ce
projet n’a pas un consensus national et est souvent marqué par une trêve non affichée avec les Israéliens.
Le nouveau gouvernement devra trouver un compromis. En dehors de cette divergence, il y a la question de la sécurité dans les territoires
palestiniens : comment organiser le travail de ses différents services en Cisjordanie comme dans la bande de Gaza. Il y a aussi le problème des armes des différentes factions. Il ne faut pas
non plus oublier la reconstruction de Gaza, la fin du blocus, les déplacements entre la bande de Gaza et la Cisjordanie, la continuité géographique entre les deux régions, et bien sûr, la manière
d’effacer les conséquences de cette division qui a duré plus de 4 ans.
Le défi Israélien : Israël est le grand perdant dans cet accord. Toute unité nationale entre Palestiniens le met devant ses responsabilités.
C’est pour cela que le gouvernement israélien essaiera par tous les moyens de créer des problèmes à ce nouveau gouvernement. Les menaces ont déjà commencé.
Les autorités israéliennes pourront fermer les passages qui relient la bande de Gaza à la Cisjordanie, elles pourront interdire aux ministres
palestiniens de se déplacer entre ces deux points, elles pourront également suspendre le transfert des taxes au budget palestinien. Mais le vrai danger viendra surtout des provocations d’Israël
face aux factions palestiniennes, sous forme d’attaques, de bombardements, et d’incursions, notamment à Gaza, afin de susciter leur réaction par des tirs de roquettes, ce qui mènerait la région à
une nouvelle escalade. Dans ce cas, Israël serait le premier bénéficiaire de cette situation de guerre et d’instabilité sous le prétexte de défendre ses citoyens et sa sécurité.
Et pour finir, le défi international : la Communauté Internationale officielle pourrait, elle, approuver la position israélienne, couper les
aides accordées à l’autorité palestinienne, elle pourrait aussi faire pression sur ce nouveau gouvernement palestinien afin qu’il accepte les conditions du Quartet pour le Proche-Orient, soit, la
cessation des violences, et la reconnaissance des accords signés par Israël et l’OLP.
Cette Communauté pourrait reprendre sa position de 2006 quand elle avait boycotté le gouvernement créé après les élections de 2006 dans les
territoires palestiniens.
Devant ces défis, le nouveau gouvernement devra être ferme, il devra résister, continuer de travailler, même dans des conditions extrêmement
difficiles et dans un contexte particulier marqué par des menaces et le manque de moyens.
Malgré ces défis et les difficultés de leur application, les dirigeants et les mouvements palestiniens doivent rester conscients d’être à la hauteur
des attentes de la population, pour que se fasse l’unité nationale et pour permettre à notre peuple de décider de son destin et d’instaurer un Etat libre et indépendant, son Etat, la
Palestine.
Le 19 mai par Ziad Medoukh
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